● Ce résumé est adapté de l’essai écrit par Rabbi Sacks en 2012, disponible ici.
Pin’has est le premier exemple d’un zélote dans la Torah. Il fut suivi, bien des siècles plus tard, par la seule autre figure du Tanakh à être qualifiée de zélote : le prophète Éliyahou. Mais qui était Pin’has? Tel que nous l’avons lu dans la parachat Balak de la semaine dernière, après que Bil’aam n’ait pas pu maudire les enfants d’Israël, il convainquit les femmes de Moav de séduire les hommes israélites et de les entraîner vers l’idolâtrie. Cela provoqua la colère divine, et une plaie éclata parmi le peuple. Puis, Zimri, un chef de la tribu de Chimon, alla jusqu’à amener une femme midianite dans le camp et avoir une relation avec elle en public. Moïse, peut-être désemparé (lui-même avait épousé une Midianite), resta passif. Pin’has prit alors l’initiative, les tua tous deux, et la plaie cessa. D.ieu donne ensuite “une alliance de paix” à Pin’has avec pour message qu’il n’aura plus jamais besoin d’agir avec violence à nouveau.
Le récit d’Éliahou, notre autre zélote, commence avec l’accession au trône d’A’hav, roi du royaume du nord. A’hav avait épousé Izevel et introduisit le culte idolâtre de Baal en Israël. Eliyahou s’engagea à discréditer les adeptes de Baal.
Pin’has et Éliyahou furent tous deux des héros religieux. Ils passèrent à l'action lorsque personne n’osa le faire. Ils prirent des risques personnels pour l’intérêt de D.ieu et du peuple. Pourtant, le traitement de leur action est profondément ambivalent.
Que pouvons-nous apprendre de cela ? Devons-nous nous méfier du zèle, ou au contraire admirer ces hommes comme des modèles à suivre ? Après tout, D.ieu Lui-même est appelé « zélote » dans la Torah.
Dans l’histoire d’Éliyahou, D.ieu lui montre un vent puissant, un tremblement de terre et un feu, puis vient une voix douce et subtile. Il demande alors une seconde fois à Éliyahou : « Que fais-tu ici ? » et Éliyahou répond : « J’ai été plein de zèle… » Il n’a pas compris que D.ieu voulait lui enseigner que Sa présence ne se trouve pas dans la violence, mais dans la douceur et la parole discrète. D.ieu lui ordonne alors de désigner Élicha comme son successeur. Pin’has et Éliyahou sont donc, tous deux, subtilement réprimandés par D.ieu.
Pourquoi cette ambivalence morale ? Car le zélote agit en dehors du cadre légal. Éliyahou offre un sacrifice hors du Temple, ce qui est normalement interdit. Pin’has n’était ni un roi ni un juge, mais il prit la justice entre ses mains. Il existe des cas exceptionnels pour lesquels le roi ou le tribunal peut agir en dehors de la procédure à des fins de maintien de l’ordre. D’un point de vue halakhique, l’acte de Pin’has est sévèrement encadré mais pas encouragé. Le Talmud qualifie cette Halakha de halakha ve-ein morin kein “Une loi qui n’est pas enseignée.” Si Zimri s’était retourné et avait tué Pin’has en légitime défense, il aurait été innocent. Si Pin’has avait agi une seconde trop tard, il aurait été coupable d’homicide. Un zélote agit en fait agit pour D.ieu en agissant par violence vertueuse. Tel que Rachi dit en commentant sur la phrase : “Pin’has… a détourné Ma colère de sur les enfants d’Israël en étant zélote avec Mon zèle” : “Il a exécuté Ma vengeance et a manifesté Ma colère” (Rachi sur Bamidbar 25:11). C’est là où on doit faire attention. En tant que juifs, on doit « marcher dans les voies de D.ieu », c’est-à-dire imiter Ses attributs. « De même qu’Il est miséricordieux et compatissant, sois miséricordieux et compatissant. » Mais ce n’est pas le cas pour la justice punitive : seul D.ieu peut juger sans procès. Nous, êtres humains, ne le pouvons pas. Et si nous avons tort ? Ce sont des formes de justice qui appartiennent à D.ieu seul.
Le zèlote religieux est donc extrêmement risqué. Il n’est permis qu’aux plus saints, une seule fois dans leur vie, et uniquement lorsque la nation est en péril, et qu’il n’y a pas d’autre choix. Rien n’est plus dangereux dans la vie religieuse que le zèle, et rien n’est plus profond que la vérité révélée à Éliyahou : D.ieu ne se trouve pas dans la force, mais dans la voix douce qui ramène le pécheur sur le droit chemin. Quant à la vengeance, elle appartient à D.ieu seul.
Autour de la table de Chabbat
Comment peut-on faire la différence entre agir par colère et agir pour la justice ?
Pourquoi quelqu’un comme Pin’has ne serait-il pas choisi comme dirigeant, malgré son héroïsme ?
Quelles sont les qualités d’un bon dirigeant ? Ces qualités changent-elles selon le contexte ?
À propos de la Paracha
Écrit par Sara Lamm
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
La paracha en bref
Pin’has, le petit-fils d’Aharon, reçoit une alliance de paix et le sacerdoce en récompense de son acte de zèle : avoir tué Zimri et une femme midianite. Au cours d’un recensement, 601 730 hommes âgés de vingt à soixante ans sont dénombrés. D.ieu ordonne à Moché de partager la terre d’Israël par tirage au sort. Les filles de Tselof’had plaident avec succès pour obtenir la portion de terre de leur père, établissant ainsi une nouvelle loi sur l’héritage. Moché nomme Yéhochoua comme son successeur. Notre paracha se conclut par une liste détaillée des sacrifices quotidiens ainsi que des korbanot supplémentaires pour le Chabbat, Roch ‘Hodech et les principales fêtes tout au long de l’année.
Philosophie de Rabbi Sacks
Approfondissement
Il existe un temps et un lieu pour le zèle, mais ces moments sont extrêmement rares. Les zélotes ont participé malgré eux à la destruction de Jérusalem en se battant entre eux au lieu de lutter contre les Romains. Dans ce cas, bien que chaque homme ait été convaincu d’agir pour la justice, leur zèle était mal placé. De plus, verser le sang est incompatible avec le service sacré – même le roi David ne fut pas autorisé à construire le Temple pour cette raison.
C’est pourquoi, comme l’a fait remarquer Rabbi Menahem Mendel de Kotzk, un zélote ne peut pas être un dirigeant. Bien que Pin’has et Élyiahou aient tous deux agi avec audace pour défendre l’honneur de D.ieu en temps de crise nationale et furent loués pour leur courage, ils furent également réprimandés en douceur. Pin’has a exécuté un jugement sans procès, ce qui, en temps normal, n’est pas un comportement à imiter. Éliyahou a appris plus tard que D.ieu ne se trouve ni dans le feu ni dans la fureur, mais dans une voix douce et subtile.
Un zélote agit avec une colère juste – mais il s’agit tout de même de colère. Halakhiquement, ses actions sont reconnues mais non encouragées ; le zèle est perçu comme dangereusement proche de l’anarchie. Le véritable leadership et la sainteté résident dans la retenue, la compassion et le respect du processus – non dans la violence justifiée.
Dans quelles circonstances est-il justifié d’agir avec zèle, comme Éliyahou et Pin’has ?
Activité sur la paracha
Simon ressent
Une variante du jeu “Jacques a dit” : ici, les consignes sont des émotions ou des réactions : “Simon dit : agis comme si tu étais très énervé !” ou “Simon dit : aie l’air super fier !” ou encore “Fais comme si tu faisais face à un tyran !” Cette version permet d’exprimer des émotions fortes de façon ludique, et nous rappelle que défendre ce qui est juste ne signifie pas toujours être sérieux ; parfois, cela consiste simplement à faire preuve de courage et de cœur.
Quelles émotions sont les plus faciles à exprimer dans ce jeu ? Quelles émotions sont les plus difficiles à montrer ?
Une histoire pour tous les âges
Dépasser les limites
Noa ne savait jamais ce que Jordan allait faire. Elle pensait qu’il était l’élève le plus important de la classe de 5e. Les petites choses qu’il faisait – lancer les ballons des autres enfants hors de portée, se moquer des élèves en classe s’ils faisaient une erreur, bousculer les plus petits dans le bus scolaire – l’agaçaient au plus haut point, mais elle savait qu’elle ne pouvait rien y faire.
Un jour à la cantine, il coupa la file devant les quatre derniers enfants qui attendaient patiemment et se servit de tous les cookies restants. Tous, jusqu’au dernier. Yaël, la nouvelle fille, timide, surprit tout le monde en prenant la parole : « Euh, Jordan… je trouve ça vraiment injuste. » Jordan se retourna, la dominant de sa hauteur : « Et alors ? Qu’est-ce que ça peut te faire ? »
Le cœur de Noa battait la chamade. Elle ne connaissait pas très bien Yaël, mais elle savait qu’il n’était pas juste de la laisser seule face à un tyran. « Moi, ça me fait quelque chose », dit-elle. « Yaël a raison. Tu ne peux pas couper comme ça. Et puis, tu as pris les cinq cookies. Il devrait y en avoir un pour chacun. » « C’est le repas, pas la loi », ricana Jordan.
Les doigts tremblants, Noa s’avança au début de la file et fit face à Jordan. Elle prit quatre des cinq cookies de son plateau et les remit aux enfants qui attendaient, adressant un signe de tête à Yaël.
Jordan haussa les épaules et partit. Et c’était tout. Noa n’avait pas crié. Elle n’avait pas eu recours à la violence. Elle avait simplement fait un pas en avant pour la justice. Quelquefois, pensa-t-elle en se rasseyant, il est important de s’exprimer. Puis elle sourit à Yaël, qui vint s’asseoir à côté d’elle.
Dans quels types de situations sociales est-il plus difficile de faire ce qui est juste ?
À propos de la Haftara
Écrit par Rabbi Barry Kleinberg
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
Résumé de la Haftara
La Haftara en bref
Rois I, 18:46–19:21
La haftara de cette semaine suit celle du prophète Éliyahou après sa victoire spectaculaire contre les prophètes de Baal.
Porté par D.ieu, Éliyahou dépasse en courant le char du roi A’hav jusqu’à Yizréel. Mais lorsque la reine Izevel menace sa vie, Éliyahou s’enfuit dans le désert, désespéré, et demande la mort. Un ange lui apporte de la nourriture et de l’eau, et il marche pendant quarante jours jusqu’au mont ‘Horev.
Arrivé à ‘Horev, Éliyahou se réfugie dans une grotte et expérimente une théophanie : D.ieu ne se trouve ni dans le vent, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu, mais dans une voix douce et subtile. D.ieu le réconforte et lui confie une mission : oindre ‘Hazaël comme roi d’Aram, Yéhou comme roi d’Israël, et Élicha comme son successeur prophétique.
Éliyahou quitte la grotte, trouve Élicha en train de labourer, et l’appelle à le suivre. Élicha abandonne tout pour suivre Éliyahou, marquant le début d’une nouvelle génération prophétique.
Connaissez-vous des histoires miraculeuses à propos d’Éliyahou et d’Élicha ?
Points de réflexion
Le nombre de jours du voyage d’Élyiahou jusqu’à ‘Horev vous rappelle-t-il quelque chose ?
Comment D.ieu peut-Il être dans une “voix douce et subtile” ? Qu’est-ce que cela signifie ?
Connexions du Tanakh
Liens entre la paracha et la Haftara
Le lien évident entre la paracha et la haftara de cette semaine est le zèle. Pin’has et Éliahou ont tous deux fait preuve d’un zèle sans précédent pour Hachem. Dans la littérature rabbinique, il est aussi écrit que “Pin’has est Éliahou”. La signification exacte de cette affirmation n’est pas claire. Il se pourrait simplement que les deux hommes partagent les mêmes qualités. Rabbi Chimchon Raphaël Hirsch affirme que l’esprit de zèle manifesté par Pin’has s’est perpétué de façon immortelle à travers Éliahou. Cependant, une différence notable entre ces deux zélotes est que Pin’has est récompensé tandis qu’Élyiahou ne l’est pas.
Un autre lien entre la paracha et la haftara est une demande faite à D.ieu de nommer un nouveau dirigeant. Moché demande qu’Hachem désigne un successeur après sa mort. Éliyahou, quant à lui, demande que sa vie prenne fin et que Élicha soit oint comme son successeur.
Il existe cependant des différences notables entre les deux récits. Moché est informé qu’il mourra, tandis qu’Éliyahou demande la mort. Moché demande la nomination d’un successeur, tandis qu’Éliyahou reçoit l’ordre d’en nommer un.
La manière dont prennent fin les vies de Moché et d’Éliyahou est aussi intéressante à comparer. À la fin de la Torah, Moshé meurt sur une montagne, et il est précisé que personne ne connaît, ni ne connaîtra jamais, l’emplacement exact de sa tombe. (Dévarim 34:6) Éliyahou est emporté au ciel dans un tourbillon, accompagné d’un char et de chevaux de feu. Il est dit qu’il reviendra un jour pour annoncer la venue du Machia’h. Il apparaît également dans de nombreuses histoires aggadiques, comme une présence de direction et de sagesse.
Contexte pour les Prophètes
Le livre des Rois
À l’époque où Éliyahou servait en tant que prophète pour le peuple juif, le peuple traversait une profonde crise religieuse et une instabilité politique marquée. Après le règne du roi Chlomo, le royaume fut scindé entre Israël au nord et Yéhouda au sud. Le roi Yarov’am Ier institutionnalisa l’idolâtrie des veaux d’or, et sous A’hav, l’idolâtrie ne fut plus seulement tolérée, elle devint dominante. Cela explique probablement pourquoi Éliahou adopta une approche aussi radicale. Il voyait la nécessité d’un changement dramatique dans le comportement du peuple.
Rabbi Sacks citait souvent le verset de la haftara de cette semaine selon lequel D.ieu se trouve dans la « voix douce et subtile ». Il écrivait : « D.ieu disait à Éliyahou : les faux prophètes croient en la puissance… Éliyahou devait apprendre que le zèle est profondément dangereux… [Il] gagne la bataille mais pas la guerre. Il engendre la peur, pas l’amour. Il risque de profaner la cause même qu’il cherche à sanctifier. La foi parle d’une toute autre voix, nous exhortant, pour reprendre les mots de Robert Kennedy, à ‘apprivoiser la sauvagerie de l’homme et adoucir la vie de ce monde’. »
La religion échoue lorsqu’elle cherche à imposer la vérité par la force, quelle que soit la vérité, quelle que soit la force. Ce n’est que lorsqu’elle se dépouille du pouvoir terrestre que la foi apprend à exprimer les vérités bienfaisantes du ciel…
Tant que nous ne comprendrons pas cela, de bonnes personnes feront le mal pour des raisons altruistes, détournant les gens du D.ieu même qu’ils cherchent à servir. La pureté de leurs intentions ne purifiera pas le sang qu’ils cherchent à verser. »
Citation de la semaine
« De temps en temps, nous devons nous retirer du bruit et de l’agitation du monde social, et créer en nos cœurs le silence du désert, où, dans le calme, nous pouvons entendre le Kol Démama Daka, la voix douce et subtile de D.ieu, nous disant que nous sommes aimés, entendus, étreints par les bras éternels de D.ieu, et que nous ne sommes pas seuls. »
Le son du silence, Bamidbar, Les voix de l’alliance
Réflexions supplémentaires
Comment peut-on apprendre aux gens à entendre D.ieu non pas dans le tourbillon, mais dans la “voix douce et subtile” ?
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the
Family Edition
is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
Résumé Ce résumé est adapté de l’essai principal de cette semaine par Rabbi Sacks. Moïse voulait s’assurer qu’un nouveau dirigeant serait prêt à prendre la…
Le zélote
Édition Familiale
Pin'has
Inspiré par les enseignements et les idées de Rabbi Sacks
Télécharger le PDF
Essai Principal
Pin'has
Le zélote
Lire plus >
Lire en
Partager
Résumé du Covenant & Conversation
● Ce résumé est adapté de l’essai écrit par Rabbi Sacks en 2012, disponible ici.
Pin’has est le premier exemple d’un zélote dans la Torah. Il fut suivi, bien des siècles plus tard, par la seule autre figure du Tanakh à être qualifiée de zélote : le prophète Éliyahou. Mais qui était Pin’has? Tel que nous l’avons lu dans la parachat Balak de la semaine dernière, après que Bil’aam n’ait pas pu maudire les enfants d’Israël, il convainquit les femmes de Moav de séduire les hommes israélites et de les entraîner vers l’idolâtrie. Cela provoqua la colère divine, et une plaie éclata parmi le peuple. Puis, Zimri, un chef de la tribu de Chimon, alla jusqu’à amener une femme midianite dans le camp et avoir une relation avec elle en public. Moïse, peut-être désemparé (lui-même avait épousé une Midianite), resta passif. Pin’has prit alors l’initiative, les tua tous deux, et la plaie cessa. D.ieu donne ensuite “une alliance de paix” à Pin’has avec pour message qu’il n’aura plus jamais besoin d’agir avec violence à nouveau.
Le récit d’Éliahou, notre autre zélote, commence avec l’accession au trône d’A’hav, roi du royaume du nord. A’hav avait épousé Izevel et introduisit le culte idolâtre de Baal en Israël. Eliyahou s’engagea à discréditer les adeptes de Baal.
Pin’has et Éliyahou furent tous deux des héros religieux. Ils passèrent à l'action lorsque personne n’osa le faire. Ils prirent des risques personnels pour l’intérêt de D.ieu et du peuple. Pourtant, le traitement de leur action est profondément ambivalent.
Que pouvons-nous apprendre de cela ? Devons-nous nous méfier du zèle, ou au contraire admirer ces hommes comme des modèles à suivre ? Après tout, D.ieu Lui-même est appelé « zélote » dans la Torah.
Dans l’histoire d’Éliyahou, D.ieu lui montre un vent puissant, un tremblement de terre et un feu, puis vient une voix douce et subtile. Il demande alors une seconde fois à Éliyahou : « Que fais-tu ici ? » et Éliyahou répond : « J’ai été plein de zèle… » Il n’a pas compris que D.ieu voulait lui enseigner que Sa présence ne se trouve pas dans la violence, mais dans la douceur et la parole discrète. D.ieu lui ordonne alors de désigner Élicha comme son successeur. Pin’has et Éliyahou sont donc, tous deux, subtilement réprimandés par D.ieu.
Pourquoi cette ambivalence morale ? Car le zélote agit en dehors du cadre légal. Éliyahou offre un sacrifice hors du Temple, ce qui est normalement interdit. Pin’has n’était ni un roi ni un juge, mais il prit la justice entre ses mains. Il existe des cas exceptionnels pour lesquels le roi ou le tribunal peut agir en dehors de la procédure à des fins de maintien de l’ordre. D’un point de vue halakhique, l’acte de Pin’has est sévèrement encadré mais pas encouragé. Le Talmud qualifie cette Halakha de halakha ve-ein morin kein “Une loi qui n’est pas enseignée.” Si Zimri s’était retourné et avait tué Pin’has en légitime défense, il aurait été innocent. Si Pin’has avait agi une seconde trop tard, il aurait été coupable d’homicide. Un zélote agit en fait agit pour D.ieu en agissant par violence vertueuse. Tel que Rachi dit en commentant sur la phrase : “Pin’has… a détourné Ma colère de sur les enfants d’Israël en étant zélote avec Mon zèle” : “Il a exécuté Ma vengeance et a manifesté Ma colère” (Rachi sur Bamidbar 25:11). C’est là où on doit faire attention. En tant que juifs, on doit « marcher dans les voies de D.ieu », c’est-à-dire imiter Ses attributs. « De même qu’Il est miséricordieux et compatissant, sois miséricordieux et compatissant. » Mais ce n’est pas le cas pour la justice punitive : seul D.ieu peut juger sans procès. Nous, êtres humains, ne le pouvons pas. Et si nous avons tort ? Ce sont des formes de justice qui appartiennent à D.ieu seul.
Le zèlote religieux est donc extrêmement risqué. Il n’est permis qu’aux plus saints, une seule fois dans leur vie, et uniquement lorsque la nation est en péril, et qu’il n’y a pas d’autre choix. Rien n’est plus dangereux dans la vie religieuse que le zèle, et rien n’est plus profond que la vérité révélée à Éliyahou : D.ieu ne se trouve pas dans la force, mais dans la voix douce qui ramène le pécheur sur le droit chemin. Quant à la vengeance, elle appartient à D.ieu seul.
Autour de la table de Chabbat
À propos de la Paracha
Écrit par Sara Lamm
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
La paracha en bref
Pin’has, le petit-fils d’Aharon, reçoit une alliance de paix et le sacerdoce en récompense de son acte de zèle : avoir tué Zimri et une femme midianite. Au cours d’un recensement, 601 730 hommes âgés de vingt à soixante ans sont dénombrés. D.ieu ordonne à Moché de partager la terre d’Israël par tirage au sort. Les filles de Tselof’had plaident avec succès pour obtenir la portion de terre de leur père, établissant ainsi une nouvelle loi sur l’héritage. Moché nomme Yéhochoua comme son successeur. Notre paracha se conclut par une liste détaillée des sacrifices quotidiens ainsi que des korbanot supplémentaires pour le Chabbat, Roch ‘Hodech et les principales fêtes tout au long de l’année.
Philosophie de Rabbi Sacks
Approfondissement
Il existe un temps et un lieu pour le zèle, mais ces moments sont extrêmement rares. Les zélotes ont participé malgré eux à la destruction de Jérusalem en se battant entre eux au lieu de lutter contre les Romains. Dans ce cas, bien que chaque homme ait été convaincu d’agir pour la justice, leur zèle était mal placé. De plus, verser le sang est incompatible avec le service sacré – même le roi David ne fut pas autorisé à construire le Temple pour cette raison.
C’est pourquoi, comme l’a fait remarquer Rabbi Menahem Mendel de Kotzk, un zélote ne peut pas être un dirigeant. Bien que Pin’has et Élyiahou aient tous deux agi avec audace pour défendre l’honneur de D.ieu en temps de crise nationale et furent loués pour leur courage, ils furent également réprimandés en douceur. Pin’has a exécuté un jugement sans procès, ce qui, en temps normal, n’est pas un comportement à imiter. Éliyahou a appris plus tard que D.ieu ne se trouve ni dans le feu ni dans la fureur, mais dans une voix douce et subtile.
Un zélote agit avec une colère juste – mais il s’agit tout de même de colère. Halakhiquement, ses actions sont reconnues mais non encouragées ; le zèle est perçu comme dangereusement proche de l’anarchie. Le véritable leadership et la sainteté résident dans la retenue, la compassion et le respect du processus – non dans la violence justifiée.
Dans quelles circonstances est-il justifié d’agir avec zèle, comme Éliyahou et Pin’has ?
Activité sur la paracha
Simon ressent
Une variante du jeu “Jacques a dit” : ici, les consignes sont des émotions ou des réactions : “Simon dit : agis comme si tu étais très énervé !” ou “Simon dit : aie l’air super fier !” ou encore “Fais comme si tu faisais face à un tyran !” Cette version permet d’exprimer des émotions fortes de façon ludique, et nous rappelle que défendre ce qui est juste ne signifie pas toujours être sérieux ; parfois, cela consiste simplement à faire preuve de courage et de cœur.
Quelles émotions sont les plus faciles à exprimer dans ce jeu ? Quelles émotions sont les plus difficiles à montrer ?
Une histoire pour tous les âges
Dépasser les limites
Un jour à la cantine, il coupa la file devant les quatre derniers enfants qui attendaient patiemment et se servit de tous les cookies restants. Tous, jusqu’au dernier. Yaël, la nouvelle fille, timide, surprit tout le monde en prenant la parole : « Euh, Jordan… je trouve ça vraiment injuste. » Jordan se retourna, la dominant de sa hauteur : « Et alors ? Qu’est-ce que ça peut te faire ? »
Le cœur de Noa battait la chamade. Elle ne connaissait pas très bien Yaël, mais elle savait qu’il n’était pas juste de la laisser seule face à un tyran. « Moi, ça me fait quelque chose », dit-elle. « Yaël a raison. Tu ne peux pas couper comme ça. Et puis, tu as pris les cinq cookies. Il devrait y en avoir un pour chacun. » « C’est le repas, pas la loi », ricana Jordan.
Les doigts tremblants, Noa s’avança au début de la file et fit face à Jordan. Elle prit quatre des cinq cookies de son plateau et les remit aux enfants qui attendaient, adressant un signe de tête à Yaël.
Jordan haussa les épaules et partit. Et c’était tout. Noa n’avait pas crié. Elle n’avait pas eu recours à la violence. Elle avait simplement fait un pas en avant pour la justice. Quelquefois, pensa-t-elle en se rasseyant, il est important de s’exprimer. Puis elle sourit à Yaël, qui vint s’asseoir à côté d’elle.
Dans quels types de situations sociales est-il plus difficile de faire ce qui est juste ?
À propos de la Haftara
Écrit par Rabbi Barry Kleinberg
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
Résumé de la Haftara
La Haftara en bref
Rois I, 18:46–19:21
La haftara de cette semaine suit celle du prophète Éliyahou après sa victoire spectaculaire contre les prophètes de Baal.
Porté par D.ieu, Éliyahou dépasse en courant le char du roi A’hav jusqu’à Yizréel. Mais lorsque la reine Izevel menace sa vie, Éliyahou s’enfuit dans le désert, désespéré, et demande la mort. Un ange lui apporte de la nourriture et de l’eau, et il marche pendant quarante jours jusqu’au mont ‘Horev.
Arrivé à ‘Horev, Éliyahou se réfugie dans une grotte et expérimente une théophanie : D.ieu ne se trouve ni dans le vent, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu, mais dans une voix douce et subtile. D.ieu le réconforte et lui confie une mission : oindre ‘Hazaël comme roi d’Aram, Yéhou comme roi d’Israël, et Élicha comme son successeur prophétique.
Éliyahou quitte la grotte, trouve Élicha en train de labourer, et l’appelle à le suivre. Élicha abandonne tout pour suivre Éliyahou, marquant le début d’une nouvelle génération prophétique.
Connaissez-vous des histoires miraculeuses à propos d’Éliyahou et d’Élicha ?
Points de réflexion
Connexions du Tanakh
Liens entre la paracha et la Haftara
Le lien évident entre la paracha et la haftara de cette semaine est le zèle. Pin’has et Éliahou ont tous deux fait preuve d’un zèle sans précédent pour Hachem. Dans la littérature rabbinique, il est aussi écrit que “Pin’has est Éliahou”. La signification exacte de cette affirmation n’est pas claire. Il se pourrait simplement que les deux hommes partagent les mêmes qualités. Rabbi Chimchon Raphaël Hirsch affirme que l’esprit de zèle manifesté par Pin’has s’est perpétué de façon immortelle à travers Éliahou. Cependant, une différence notable entre ces deux zélotes est que Pin’has est récompensé tandis qu’Élyiahou ne l’est pas.
Un autre lien entre la paracha et la haftara est une demande faite à D.ieu de nommer un nouveau dirigeant. Moché demande qu’Hachem désigne un successeur après sa mort. Éliyahou, quant à lui, demande que sa vie prenne fin et que Élicha soit oint comme son successeur.
Il existe cependant des différences notables entre les deux récits. Moché est informé qu’il mourra, tandis qu’Éliyahou demande la mort. Moché demande la nomination d’un successeur, tandis qu’Éliyahou reçoit l’ordre d’en nommer un.
La manière dont prennent fin les vies de Moché et d’Éliyahou est aussi intéressante à comparer. À la fin de la Torah, Moshé meurt sur une montagne, et il est précisé que personne ne connaît, ni ne connaîtra jamais, l’emplacement exact de sa tombe. (Dévarim 34:6) Éliyahou est emporté au ciel dans un tourbillon, accompagné d’un char et de chevaux de feu. Il est dit qu’il reviendra un jour pour annoncer la venue du Machia’h. Il apparaît également dans de nombreuses histoires aggadiques, comme une présence de direction et de sagesse.
Contexte pour les Prophètes
Le livre des Rois
À l’époque où Éliyahou servait en tant que prophète pour le peuple juif, le peuple traversait une profonde crise religieuse et une instabilité politique marquée. Après le règne du roi Chlomo, le royaume fut scindé entre Israël au nord et Yéhouda au sud. Le roi Yarov’am Ier institutionnalisa l’idolâtrie des veaux d’or, et sous A’hav, l’idolâtrie ne fut plus seulement tolérée, elle devint dominante. Cela explique probablement pourquoi Éliahou adopta une approche aussi radicale. Il voyait la nécessité d’un changement dramatique dans le comportement du peuple.
Rabbi Sacks citait souvent le verset de la haftara de cette semaine selon lequel D.ieu se trouve dans la « voix douce et subtile ». Il écrivait : « D.ieu disait à Éliyahou : les faux prophètes croient en la puissance… Éliyahou devait apprendre que le zèle est profondément dangereux… [Il] gagne la bataille mais pas la guerre. Il engendre la peur, pas l’amour. Il risque de profaner la cause même qu’il cherche à sanctifier. La foi parle d’une toute autre voix, nous exhortant, pour reprendre les mots de Robert Kennedy, à ‘apprivoiser la sauvagerie de l’homme et adoucir la vie de ce monde’. »
La religion échoue lorsqu’elle cherche à imposer la vérité par la force, quelle que soit la vérité, quelle que soit la force. Ce n’est que lorsqu’elle se dépouille du pouvoir terrestre que la foi apprend à exprimer les vérités bienfaisantes du ciel…
Tant que nous ne comprendrons pas cela, de bonnes personnes feront le mal pour des raisons altruistes, détournant les gens du D.ieu même qu’ils cherchent à servir. La pureté de leurs intentions ne purifiera pas le sang qu’ils cherchent à verser. »
Citation de la semaine
« De temps en temps, nous devons nous retirer du bruit et de l’agitation du monde social, et créer en nos cœurs le silence du désert, où, dans le calme, nous pouvons entendre le Kol Démama Daka, la voix douce et subtile de D.ieu, nous disant que nous sommes aimés, entendus, étreints par les bras éternels de D.ieu, et que nous ne sommes pas seuls. »
Le son du silence, Bamidbar, Les voix de l’alliance
Réflexions supplémentaires
Comment peut-on apprendre aux gens à entendre D.ieu non pas dans le tourbillon, mais dans la “voix douce et subtile” ?
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the Family Edition is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
Rejeté des nations
< PrécédentBientôt Disponible
Abonnez-vous à notre liste de diffusion pour recevoir le commentaire hebdomadaire de la paracha
Plus sur Pin'has
Réguler le changement