Le livre de Bamidbar se termine de manière très étrange. Plus tôt dans la parachat Pin’has, on apprend que les cinq filles de Tsélof’had sont venues voir Moïse avec une requête basée sur la justice et les droits de l’homme. Leur père est mort sans laisser de fils. L’héritage - dans ce cas, une part de terre - se transmet de père en fils, mais ici, il n’y avait pas de descendance masculine. Il va sans dire que leur père avait droit à sa part, et elles étaient ses seules héritières. Cette part leur revenait de droit.
Moïse interrogea donc D.ieu directement, et Il s’engagea en faveur des femmes. Ce n’est que maintenant, à la fin du livre de Bamidbar, que la Torah relate un événement qui s’est produit directement en lien avec cette histoire. Les dirigeants de la tribu de Tsélof’had, Ménaché, fils de Yossef, sont venus et ont émis la plainte suivante. Si la terre allait être transmise aux filles de Tsélof’had et qu’elles allaient épouser des hommes d'une autre tribu, la terre reviendrait finalement à leurs maris, et donc aux tribus de leurs maris. Ce faisant, la terre qui avait été à l’origine donnée à la tribu de Ménaché pourrait être perdue à jamais.
Encore une fois, Moïse s’est adressé à D.ieu qui offra une solution simple. Les filles de Tsélof’had avaient droit à la terre, mais la tribu également. Ainsi, si elles souhaitaient prendre possession de la terre, elles devaient épouser des hommes de leur propre tribu. Ainsi, les deux revendications pouvaient être honorées.
Pourquoi les deux épisodes sont ainsi séparés dans le texte ? Pourquoi le livre des Nombres se termine-t-il sur cette note a priori décevante ? Et est-ce que cela fait sens de nos jours ?
Le livre des Nombres porte sur les individus. Il commence par un recensement, dont le but n'est pas tant de nous révéler le nombre exact d'Israélites que de transmettre l’idée suivante : lorsque D.ieu ordonne un recensement, c'est pour signifier au peuple que chaque personne compte. Le livre se concentre également sur la psychologie des individus. Nous lisons sur le désespoir de Moïse, la critique d’Aaron et de Myriam à son encontre, des espions qui n’ont pas eu le courage de revenir avec un compte-rendu positif, et des mécontents, menés par Kora’h, qui ont remis en cause le leadership de Moïse. Nous lisons à propos de Yéchoua et Caleb, Eldad et Medad, Datam et Aviram, Zimri et Pin’has, Balak, Bil’am et les autres.
C’est le contexte de la revendication des filles de Tsélof’had. Elles revendiquaient leurs droits en tant qu’individus - avec raison. Mais la société n’est pas construite uniquement sur les individus. D'où l'insistance, tout au long du livre des Nombres, sur le rôle central des tribus en tant que principe organisateur de la vie juive. Les Israélites étaient comptés tribu par tribu. La Torah établit l’emplacement précis de leur campement autour du Michkan et l’ordre dans lequel ils doivent se déplacer. Dans Nasso, de manière excessivement longue, la Torah répète les dons de chaque tribu à l’inauguration du Michkan, malgré le fait que chacune d’entre elles ait donné exactement pareil.
L’existence d’un équivalent de tribus est fondamentale dans une société libre. Nous avons tous une série d’identités, basées en partie sur le contexte familial, en partie sur la profession, en partie sur la localité et sur la communauté. Ces “structures de médiation”, plus grandes que l’individu mais plus petites que l’état, sont là où l’on développe nos interactions et nos identités complexes, vivantes et interactives. Elles représentent le domaine de la famille, des amis, des voisins et des collègues et elles sont constitutives de ce qui est collectivement connu sous le nom de société civile. Une société civile forte est essentielle à la liberté. C’est la raison pour laquelle, aux côtés des droits individuels, une société doit créer de l’espace pour les identités de groupe.
Malgré son énorme accent mis sur la valeur de l’individu, le judaïsme insiste également sur la valeur de ces institutions qui préservent et protègent nos identités en tant que membres de groupes qui les composent. Nous avons des droits en tant qu’individus, mais des identités uniquement en tant que membres de tribus. Honorer les deux est délicat, difficile et nécessaire. Le livre de Bamidbar se termine en nous expliquant comment s’y prendre.
Quelles identités de groupes possédez-vous?
Pourquoi est-ce important de s’affilier à des groupes et à des tribus ?
Est-ce difficile de respecter les droits de l’individu et de la société en même temps ? Pourquoi?
Une communauté soucieuse
Par Joanna Benarroch
Dans l’article de cette semaine, Rabbi Sacks souligne l’importance de faire partie d’une communauté. Il articule magnifiquement l’essence d’une communauté dans son livre, From Optimism to Hope (De l’optimisme à l’espoir) : “La communauté est une société avec un visage humain - l’endroit dans lequel nous savons que nous ne sommes pas seuls.”
Lors de la première vague de la pandémie du Coronavirus, nous avons demandé à Rabbi Sacks s’il serait prêt à parler en ligne à des communautés et à des individus du monde entier qui avaient besoin de ‘hizouk, d’encouragement et de soutien. Rabbi Sacks a proposé gracieusement de se connecter à eux via les réseaux sociaux, Zoom et Facebook Live. Avec Pessa’h qui approchait, de nombreuses personnes se virent confrontées à l’idée de passer le Seder seules, sans leurs familles. Rabbi Sacks a donné de son plein gré de son temps pour élever les esprits et amener de la chaleur dans la vie des gens, en s’assurant qu’ils savaient qu’ils n’étaient pas seuls mais qu’ils faisaient partie d’une grande famille, une communauté, qui se souciait réellement d’eux.
Rabbi Sacks a embrassé la technologie comme un moyen de toucher les autres, et de partager Torah et sagesse. Nous le sollicitions beaucoup - Elaine et lui étaient en isolement à la maison - et je devais me connecter à distance sur son ordinateur pour lui permettre de rejoindre les sessions Zoom. Vous l’avez peut-être vu démarrer une vidéo en direct en mode “muet”, parler au téléphone, veillant à ce que tout se passe comme prévu !
Tel que Rabbi Sacks l’a exprimé dans son livre Celebrating Life (Célébrer la vie), “La communauté est l’expression humaine de l’amour divin. C’est là où je suis valorisé simplement pour qui je suis, pour la façon dont je vis et pour ce que je donne à l’autre. C’est l’endroit où ils connaissent mon nom.” Dans un monde qui peut être souvent perçu comme fragmenté et déconnecté, Rabbi Sacks nous rappelait que le vrai épanouissement et un sentiment d’appartenance peuvent être trouvés dans l’étreinte d’une communauté soucieuse et qui offre du soutien.
UN REGARD PLUS PROFOND
Joanna Benarroch partage ses propres réflexions sur l’essai de Rabbi Sacks sur Matot-Massé.
Quelle est votre citation favorite de Rabbi Sacks et pourquoi ?
Sans surprise, j’ai plusieurs citations favorites de Rabbi Sacks, mais celle qui m’occupe constamment l’esprit est “Remerciez avant de réfléchir”. Elle provient du Modé Ani, et l’idée est de remercier Hachem chaque matin, avant même de sortir du lit.
Cela résume bien la perspective de vie de Rabbi Sacks. Il était toujours reconnaissant de ce que les autres faisaient pour lui et s’assurait de l’exprimer. En s’adressant à une communauté, il remerciait toujours dans son propos introductif le rabbin local. Cela honorait le rabbin, et rappelait à la communauté à quel point ses membres étaient chanceux de l’avoir. Rabbi Sacks m’enseigna à quel point il est important de remercier ma famille, de remercier mon équipe et ceux avec qui nous interagissons dans notre vie quotidienne. Ne prenez personne pour acquis et faites en sorte que votre appréciation et vos remerciements soient exprimés à voix haute. Ne laissez pas ces mots non-dits.
Quel message principal avez-vous retenu de l’essai de cette semaine ?
L’essai de cette semaine se penche sur les droits des individus ainsi que sur l’importance de faire partie d’une communauté ; cela me rappelle à quel point Rabbi Sacks vivait par ses paroles. Il fut le catalyseur du changement dans notre communauté. Son objectif était de se projeter vingt à trente ans dans l’avenir, et de mettre les choses en place pour s’assurer que la communauté serait prospère dans les années à venir. Il accordait une grande importance à la communauté et créait un environnement qui inspirait les autres à croître et à se développer. Il voulait que les communautés soient accueillantes et inspirantes. Il croyait en elles et les encourageait.
Infos Torah
Q: Pouvez-vous visualiser quatre temps au cours desquels Moïse a eu besoin de vérifier la Halakha avec Hachem ?
Adapté de Torah IQ par David Woolf, une collection de 1500 devinettes sur la Torah, disponible dans le monde entier sur Amazon.
Guide éducatif
Infos Torah: la réponse de cette semaine
Les quatre moments sont les suivants:
Le melakel – “le blasphémateur” (Vayikra 24:10)
Pessa’h Chéni (Bamidbar 9:1)
Le Mekoshesh – le bûcheron qui transgressa Chabbat (Bamidbar 15:32)
Les lois de l’héritage, telles que soulevés par les filles de Tsélof’had (Bamidbar 36:1)
Il y a eu un cinquième moment au cours duquel Moïse n’était pas sûr de la manière halakhique d’agir, dans le cas de Zimri et de Kozbi, mais dans ce cas, Pin’has a pris les devants et a agi.
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the
Family Edition
is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
La complexité des droits de l’homme
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Mass'é
La complexité des droits de l’homme
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La paracha en bref
Ce résumé est adapté de l’essai principal de cette semaine par Rabbi Sacks, disponible ici www.rabbisacks.org/covenant-conversation/matot/la-complexite-des-droits-de-lhomme.
Le livre de Bamidbar se termine de manière très étrange. Plus tôt dans la parachat Pin’has, on apprend que les cinq filles de Tsélof’had sont venues voir Moïse avec une requête basée sur la justice et les droits de l’homme. Leur père est mort sans laisser de fils. L’héritage - dans ce cas, une part de terre - se transmet de père en fils, mais ici, il n’y avait pas de descendance masculine. Il va sans dire que leur père avait droit à sa part, et elles étaient ses seules héritières. Cette part leur revenait de droit.
Moïse interrogea donc D.ieu directement, et Il s’engagea en faveur des femmes. Ce n’est que maintenant, à la fin du livre de Bamidbar, que la Torah relate un événement qui s’est produit directement en lien avec cette histoire. Les dirigeants de la tribu de Tsélof’had, Ménaché, fils de Yossef, sont venus et ont émis la plainte suivante. Si la terre allait être transmise aux filles de Tsélof’had et qu’elles allaient épouser des hommes d'une autre tribu, la terre reviendrait finalement à leurs maris, et donc aux tribus de leurs maris. Ce faisant, la terre qui avait été à l’origine donnée à la tribu de Ménaché pourrait être perdue à jamais.
Encore une fois, Moïse s’est adressé à D.ieu qui offra une solution simple. Les filles de Tsélof’had avaient droit à la terre, mais la tribu également. Ainsi, si elles souhaitaient prendre possession de la terre, elles devaient épouser des hommes de leur propre tribu. Ainsi, les deux revendications pouvaient être honorées.
Pourquoi les deux épisodes sont ainsi séparés dans le texte ? Pourquoi le livre des Nombres se termine-t-il sur cette note a priori décevante ? Et est-ce que cela fait sens de nos jours ?
Le livre des Nombres porte sur les individus. Il commence par un recensement, dont le but n'est pas tant de nous révéler le nombre exact d'Israélites que de transmettre l’idée suivante : lorsque D.ieu ordonne un recensement, c'est pour signifier au peuple que chaque personne compte. Le livre se concentre également sur la psychologie des individus. Nous lisons sur le désespoir de Moïse, la critique d’Aaron et de Myriam à son encontre, des espions qui n’ont pas eu le courage de revenir avec un compte-rendu positif, et des mécontents, menés par Kora’h, qui ont remis en cause le leadership de Moïse. Nous lisons à propos de Yéchoua et Caleb, Eldad et Medad, Datam et Aviram, Zimri et Pin’has, Balak, Bil’am et les autres.
C’est le contexte de la revendication des filles de Tsélof’had. Elles revendiquaient leurs droits en tant qu’individus - avec raison. Mais la société n’est pas construite uniquement sur les individus. D'où l'insistance, tout au long du livre des Nombres, sur le rôle central des tribus en tant que principe organisateur de la vie juive. Les Israélites étaient comptés tribu par tribu. La Torah établit l’emplacement précis de leur campement autour du Michkan et l’ordre dans lequel ils doivent se déplacer. Dans Nasso, de manière excessivement longue, la Torah répète les dons de chaque tribu à l’inauguration du Michkan, malgré le fait que chacune d’entre elles ait donné exactement pareil.
L’existence d’un équivalent de tribus est fondamentale dans une société libre. Nous avons tous une série d’identités, basées en partie sur le contexte familial, en partie sur la profession, en partie sur la localité et sur la communauté. Ces “structures de médiation”, plus grandes que l’individu mais plus petites que l’état, sont là où l’on développe nos interactions et nos identités complexes, vivantes et interactives. Elles représentent le domaine de la famille, des amis, des voisins et des collègues et elles sont constitutives de ce qui est collectivement connu sous le nom de société civile. Une société civile forte est essentielle à la liberté. C’est la raison pour laquelle, aux côtés des droits individuels, une société doit créer de l’espace pour les identités de groupe.
Malgré son énorme accent mis sur la valeur de l’individu, le judaïsme insiste également sur la valeur de ces institutions qui préservent et protègent nos identités en tant que membres de groupes qui les composent. Nous avons des droits en tant qu’individus, mais des identités uniquement en tant que membres de tribus. Honorer les deux est délicat, difficile et nécessaire. Le livre de Bamidbar se termine en nous expliquant comment s’y prendre.
Une communauté soucieuse
Par Joanna Benarroch
Dans l’article de cette semaine, Rabbi Sacks souligne l’importance de faire partie d’une communauté. Il articule magnifiquement l’essence d’une communauté dans son livre, From Optimism to Hope (De l’optimisme à l’espoir) : “La communauté est une société avec un visage humain - l’endroit dans lequel nous savons que nous ne sommes pas seuls.”
Lors de la première vague de la pandémie du Coronavirus, nous avons demandé à Rabbi Sacks s’il serait prêt à parler en ligne à des communautés et à des individus du monde entier qui avaient besoin de ‘hizouk, d’encouragement et de soutien. Rabbi Sacks a proposé gracieusement de se connecter à eux via les réseaux sociaux, Zoom et Facebook Live. Avec Pessa’h qui approchait, de nombreuses personnes se virent confrontées à l’idée de passer le Seder seules, sans leurs familles. Rabbi Sacks a donné de son plein gré de son temps pour élever les esprits et amener de la chaleur dans la vie des gens, en s’assurant qu’ils savaient qu’ils n’étaient pas seuls mais qu’ils faisaient partie d’une grande famille, une communauté, qui se souciait réellement d’eux.
Rabbi Sacks a embrassé la technologie comme un moyen de toucher les autres, et de partager Torah et sagesse. Nous le sollicitions beaucoup - Elaine et lui étaient en isolement à la maison - et je devais me connecter à distance sur son ordinateur pour lui permettre de rejoindre les sessions Zoom. Vous l’avez peut-être vu démarrer une vidéo en direct en mode “muet”, parler au téléphone, veillant à ce que tout se passe comme prévu !
Tel que Rabbi Sacks l’a exprimé dans son livre Celebrating Life (Célébrer la vie), “La communauté est l’expression humaine de l’amour divin. C’est là où je suis valorisé simplement pour qui je suis, pour la façon dont je vis et pour ce que je donne à l’autre. C’est l’endroit où ils connaissent mon nom.” Dans un monde qui peut être souvent perçu comme fragmenté et déconnecté, Rabbi Sacks nous rappelait que le vrai épanouissement et un sentiment d’appartenance peuvent être trouvés dans l’étreinte d’une communauté soucieuse et qui offre du soutien.
UN REGARD PLUS PROFOND
Joanna Benarroch partage ses propres réflexions sur l’essai de Rabbi Sacks sur Matot-Massé.
Quelle est votre citation favorite de Rabbi Sacks et pourquoi ?
Sans surprise, j’ai plusieurs citations favorites de Rabbi Sacks, mais celle qui m’occupe constamment l’esprit est “Remerciez avant de réfléchir”. Elle provient du Modé Ani, et l’idée est de remercier Hachem chaque matin, avant même de sortir du lit.
Cela résume bien la perspective de vie de Rabbi Sacks. Il était toujours reconnaissant de ce que les autres faisaient pour lui et s’assurait de l’exprimer. En s’adressant à une communauté, il remerciait toujours dans son propos introductif le rabbin local. Cela honorait le rabbin, et rappelait à la communauté à quel point ses membres étaient chanceux de l’avoir. Rabbi Sacks m’enseigna à quel point il est important de remercier ma famille, de remercier mon équipe et ceux avec qui nous interagissons dans notre vie quotidienne. Ne prenez personne pour acquis et faites en sorte que votre appréciation et vos remerciements soient exprimés à voix haute. Ne laissez pas ces mots non-dits.
Quel message principal avez-vous retenu de l’essai de cette semaine ?
L’essai de cette semaine se penche sur les droits des individus ainsi que sur l’importance de faire partie d’une communauté ; cela me rappelle à quel point Rabbi Sacks vivait par ses paroles. Il fut le catalyseur du changement dans notre communauté. Son objectif était de se projeter vingt à trente ans dans l’avenir, et de mettre les choses en place pour s’assurer que la communauté serait prospère dans les années à venir. Il accordait une grande importance à la communauté et créait un environnement qui inspirait les autres à croître et à se développer. Il voulait que les communautés soient accueillantes et inspirantes. Il croyait en elles et les encourageait.
Infos Torah
Q: Pouvez-vous visualiser quatre temps au cours desquels Moïse a eu besoin de vérifier la Halakha avec Hachem ?
Guide éducatif
Infos Torah: la réponse de cette semaine
Les quatre moments sont les suivants:
Il y a eu un cinquième moment au cours duquel Moïse n’était pas sûr de la manière halakhique d’agir, dans le cas de Zimri et de Kozbi, mais dans ce cas, Pin’has a pris les devants et a agi.
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the Family Edition is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
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