● Ce résumé est adapté de l’essai écrit par Rabbi Sacks en 2012, disponible ici.
Il existe peu de passages aussi brûlants dans toute la littérature religieuse que le premier chapitre du livre d’Isaïe, la grande “vision” (ou “’hazon”) qui donne son nom au Chabbat précédant Ticha BéAv, le jour le plus triste de l’année juive. C’est davantage que de la grande littérature. Ce chapitre exprime l’une des grandes vérités prophétiques : une société ne peut prospérer sans honnêteté ni justice. Elle ne pourrait pas être plus pertinente pour notre époque.
Le Talmud (Chabbat 31a) enseigne que lorsque nous quitterons cette vie et arriverons aux portes du Monde futur, la première question qu’on nous posera ne sera pas une question religieuse conventionnelle (“As-tu fixé des moments pour l’étude de la Torah ?”). Cette question viendra ensuite, mais la toute première serait : “As-tu agi avec honnêteté [be-emouna] dans les affaires ?”
Les Sages ont peut-être tiré cette leçon du prophète Isaïe, qui pleura sur Jérusalem avant sa perte :
La cité fidèle est devenue une prostituée ! … Ton argent est devenu de la scorie, ton vin pur est coupé d’eau. Tes chefs sont des rebelles, complices de voleurs… Ils ne défendent pas l’orphelin, et la cause de la veuve ne les touche pas.
Le destin de Jérusalem fut scellé non pas par un échec religieux au sens conventionnel, mais par l’incapacité des gens à agir avec honnêteté. Ils adoptaient des pratiques commerciales rusées, très rentables et difficiles à détecter, comme le mélange d’argent avec des métaux de moindre valeur ou l'altération du vin. Les gens étaient focalisés sur le profit, indifférents aux souffrances que cela causait aux autres. Isaïe ne prétend pas révéler quelque chose que les gens ignoraient ; il ne s’attend pas à les surprendre - la corruption généralisée détruisait la confiance publique.
Isaïe enseignait que la malhonnêteté et la cupidité rongent la société de l’intérieur. Elles creusent le fossé entre riches et puissants d’un côté, pauvres et impuissants de l’autre, érodent le tissu social, et poussent chacun à se demander pourquoi faire des sacrifices pour le bien commun, si tout le monde semble poursuivre ses intérêts personnels. Accepter la corruption des dirigeants était un autre signe du déclin moral.
Même la religion, dit Isaïe, peut elle-même faire partie du problème. Les gens commencent à croire que le fait d’assister aux offices ou d’apporter des korbanot peut compenser une conduite immorale. Mais D.ieu ne se laisse pas corrompre “Que m’importe la multitude de vos sacrifices ? dit l’Éternel…Cessez d’apporter des offrandes sans valeur ! Je ne supporte plus vos réunions perverses. Quand vous étendez vos mains en prière, Je détourne mes yeux ; vous aurez beau multiplier les prières, Je n’écouterai pas.”
Une fois corrompu, celui qui apprend à tromper les autres en vient à croire qu’il peut même tromper D.ieu. Mais quand les affaires et la politique abandonnent toute norme morale, la société perd son équilibre et devient instable. Comme disent les Sages : adam bahoul al mamono — « l’homme devient fou pour son argent. » Et tout finit par s’effondrer, faisant le plus souffrir ceux qui le méritent le moins.
La voix prophétique d’Isaïe parle encore à notre époque. L’économie de marché est, et doit être, une entreprise morale. Sans cela, elle finira par échouer. Sans confiance, même les systèmes financiers les plus brillants peuvent s’écrouler.
Le mot-clé est émouna — fidélité, intégrité, confiance. Isaïe appelle deux fois Jérusalem kiryah néémanah, la « ville fidèle ». C’est pourquoi les Sages enseignent que la première question dans le ciel est : « As-tu conduit tes affaires avec émouna ? »
Une société fondée uniquement sur des contrats et des règlements, plutôt que sur la conscience, ne sera jamais véritablement sûre. Il y aura toujours ceux qui trouveront des échappatoires. La meilleure garantie reste morale : c’est la voix de D.ieu en nous, qui nous dit de ne pas faire ce que nous savons être mal.
L’avertissement d’Isaïe résonne encore. Quand la morale disparaît et que l’intérêt personnel domine l’économie et la politique, la confiance s’effondre et le tissu social s’effrite. C’est ainsi que toutes les grandes puissances ont commencé leur déclin. Il n’y a aucune exception. C’est pourquoi les faits montrent que — à long terme — il est plus sage de suivre les prophètes que les profits.
Autour de la table de Chabbat
Pouvez-vous penser à une fois où la malhonnêteté d’une personne a eu un impact sur un groupe ou une équipe ? Que s’est-il passé ?
Quand personne ne vous regarde, qu’est-ce qui vous aide à déterminer ce qui est bien ou mal ?
Connaissez-vous un dirigeant en qui vous avez confiance ? Qu’est-ce qui le rend digne de confiance ?
À propos de la Paracha
Écrit par Sara Lamm
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
La paracha en bref
La Paracha Dévarim commence avec Moshé s’adressant aux Bné Israël le premier jour du mois de Chevat, 37 jours avant sa mort. Il revient sur leurs 40 années de voyage, rappelant leurs fautes et les exhortant à suivre les commandements d’Hachem en entrant dans la terre promise. Moshé évoque la nomination des juges, la faute des explorateurs, et le décret divin selon lequel lui-même n’entrera pas en Erets Israël. Il raconte les événements récents, notamment les guerres contre Si’hon et Og, ainsi que l’installation des tribus de Réouven, Gad et une partie de Ménaché. Moshé prodigue des encouragements à Yehoshoua, lui assurant qu’Hachem combattra pour eux.
Philosophie de Rabbi Sacks
Approfondissement
Vers la fin du 20e siècle, les banques américaines commencèrent à adopter des pratiques complexes et malhonnêtes, notamment en ce qui concerne les hypothèques immobilières. Des avertissements leur furent donnés sur les risques d’un effondrement financier massif. Mais comme les profits augmentaient, personne n’écouta.
En 2008, la crise financière éclata. De nombreuses personnes ne purent rembourser leurs prêts, et 10 millions d’Américains perdirent leur maison dans les années qui suivirent. Les prix de l’immobilier s’effondrèrent. Subitement, des investissements jusque-là considérés comme "sûrs" devinrent sans valeur. Les banques, ayant emprunté de l’argent sur la base de ces prêts, firent faillite.
C’est la confiance qui s’est véritablement effondrée. Ne se faisant plus confiance entre elles, les banques cessèrent de se prêter de l’argent. Cela gela l’économie. Les emprunts devinrent inaccessibles, les entreprises fermèrent, les emplois disparurent. Plus de 30 millions de personnes perdirent leur travail dans le monde entier, et des millions d’autres furent plongées dans la dette. Tout cela illustra ce qui se produit lorsque la cupidité l’emporte et que les risques sont ignorés. Ce fut la pire crise financière depuis les années 1930.
La réprimande cinglante de Yéchayahou contre Jérusalem révèle une vérité intemporelle : aucune société ne peut prospérer sans intégrité. Lorsque la confiance s’effrite sous l’effet de la tromperie, de l’avidité et de l’exploitation, l’effondrement est inévitable.
Activité sur la paracha
Messager digne de confiance
Demandez à un volontaire de quitter la pièce. Les autres s’accordent ensuite sur une mission farfelue, comme "donner une cuillère à maman en chantant." Lorsque le volontaire revient, il doit accomplir sa mission sans aucune instruction verbale. Les autres joueurs ne peuvent guider le volontaire que par des applaudissements quand il est sur la bonne voie, et des acclamations lorsqu’une partie de la mission est correctement réalisée. Tout le monde doit l’encourager et espérer sa réussite.
Quels types de confiance sont mis en jeu ici ?
Une histoire pour tous les âges
Vrai ou faux
Il existe un lieu connu de tous. On l’appelait autrefois "la Ville Fidèle". Elle avait gagné ce nom il y a plusieurs générations, car ses habitants étaient réputés pour leur honnêteté, leur équité et leur compassion. Les marchés y étaient toujours animés, pleins de bannières, de voix joyeuses, de visages amicaux et d’échanges équitables. Les dirigeants étaient respectés, parfois même aimés, et les citoyens s’entraidaient sans hésiter.
Mais peu à peu, quelque chose changea. Les marchands d’argent découvrirent qu’ils pouvaient augmenter leurs profits en mélangeant des métaux moins chers et en augmentant les prix. Les vignerons diluaient leurs barriques. Les juges commencèrent à favoriser ceux qui leur offraient des cadeaux. Même si personne ne le disait ouvertement, tous remarquaient le changement. La peur d’être exploité s’installa et ce climat affecta d’autres comportements. Il devint rare de venir en aide à quelqu’un en détresse sur la route. La monnaie rendue sur les étals était souvent erronée, et les objets trouvés rarement restitués.
"Ce n’est pas bien", murmura une marchande à son fils tout en escroquant un client, "mais si je ne le fais pas, quelqu’un d’autre le fera."
La ville avait toujours la même apparence extérieure. Les gens allumaient encore leurs lampes, se réunissaient pour les fêtes et chantaient les anciens chants. Mais derrière les portes closes, les pauvres étaient ignorés, les puissants devenaient plus audacieux, et la confiance – autrefois monnaie la plus précieuse de la ville – se faisait rare. La vie continuait. Les marchés restaient ouverts. Les pièces continuaient de passer de main en main. Et peut-être, juste peut-être, chacun se demandait en silence si ce qu’il faisait était juste. Mais personne ne disait rien. Pas encore. La ville se disait toujours fidèle. Et les bannières flottaient encore, même si, en y regardant de près, leurs bords commençaient à s’effilocher.
Que faudrait-il pour qu’enfin quelqu’un prenne la parole ? Et serait-il entendu ?
Comment cette histoire pourrait-elle se terminer si la trajectoire actuelle se poursuivait ?
À propos de la Haftara
Écrit par Rabbi Barry Kleinberg
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
Résumé de la Haftara
La Haftara en bref
Yéchayahou 1:1-27 (Ashkénazes et Séfarades)
Yéchayahou 1:21-31 (Yéménites)
Yéchayahou 1:1–27 ouvre le livre d’Isaïe avec un message prophétique puissant contre Juda et Jérusalem, livré durant les règnes de Ozias, Yotam, Ahaz et Hizkiyahou. D.ieu déplore que Ses enfants se soient rebellés malgré Ses soins. La nation est moralement corrompue – pleine d’injustice, de violence et de culte hypocrite. Les rituels religieux sont dénoncés comme dénués de sens s’ils ne sont pas accompagnés de justice. D.ieu appelle à la téchouva : "Lavez-vous, purifiez-vous… cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien."
Par la bouche de Yéchayahou, D.ieu presse le peuple de poursuivre la justice, de défendre les opprimés, de prendre soin des veuves et des orphelins. S’ils se repentent, ils seront pardonnés et bénis ; sinon, ils subiront le jugement.
Et pourtant, le chapitre se conclut sur une note d’espoir : Tsion sera purifiée par le jugement, et la justice y régnera à nouveau. D.ieu promet que la droiture habitera un jour Jérusalem ; les repentants seront rachetés, tandis que les rebelles seront brisés. Le message mêle réprimande et appel au renouveau.
Points de réflexion
Ne nous égarons-nous pas tous parfois ? Pourquoi les juges doivent-ils faire preuve d’une intégrité absolue ?
Connexions du Tanakh
Liens entre la paracha et la Haftara
La haftara de cette semaine est toujours lue le Chabbat précédant Ticha BéAv et n’est donc pas directement liée à la paracha ; elle a été choisie en raison de sa pertinence dans le calendrier juif.
On peut néanmoins établir un lien avec la paracha de la semaine. Moshé mentionne dans Parachat Devarim que les Shoftim (juges) de Bné Israël doivent être des hommes d’une intégrité absolue (Devarim 1:16-17). Cela fait écho à la prophétie d’Isaïe sur le rétablissement des juges (Isaïe 1:26-27).
Une remarque du Rav Sacks sur les Shoftim de l’époque biblique : « Les "juges" mentionnés n’étaient pas simplement des magistrats au sens contemporain. Ils étaient des chefs militaires qui apparaissaient ponctuellement lorsque les Israélites – alors une confédération désordonnée de tribus – étaient attaqués par des ennemis. L’un des plus célèbres fut Gédéon, qui mena le peuple à la victoire contre les Midianites. Sa campagne fut si impressionnante que le peuple voulut le faire roi. Il répondit par des mots qui touchent au cœur du sujet : "Je ne régnerai pas sur vous, ni mon fils après moi. C’est Hachem qui régnera sur vous" (Juges 8:23). »
Notons au passage que les Bné Israël ne sont pas les seuls à devoir instituer des juges au sens juridique. Le Rambam l’énonce ainsi : « [Tous les peuples] doivent désigner des juges et des officiers dans chaque localité pour faire respecter les six autres lois noa’hides, avertir la population, et punir les contrevenants… » (Lois des Rois, 9, 14)
Pourquoi une telle insistance sur les systèmes juridiques ? Sans juges ni tribunaux, une société peut rapidement sombrer. Et de même, si les tribunaux manquent de droiture, on ne peut faire confiance à la justice.
Contexte pour les Prophètes
Le livre d’Isaïe
Alors que nous entamons la lecture de ce dernier livre de la Torah, il est bon d’en rappeler la portée.
Dans son introduction au livre de Devarim, Rav Sacks évoque "la place de Devarim dans le Tanakh tout entier. C’est l’axe autour duquel tourne toute l’histoire juive. Si la génération sortie d’Égypte avait eu la foi et le courage d’entrer en Terre promise, toute l’histoire juive aurait tourné autour de la révélation au Sinaï. Mais l’épisode des explorateurs a montré que cette génération manquait de l’esprit nécessaire. Le moment décisif est donc venu pour la génération suivante, lorsque Moshé – à la fin de sa vie – renouvelle l’alliance avec eux, condition à leur héritage de la terre. Les quatre livres précédents mènent à ce moment, et tous les autres livres du Tanakh en sont le commentaire – le récit de ce qui s’est produit par la suite.
« Devarim est le livre de l’alliance, le centre de la théologie juive, et le projet qu’il définit est unique. Il ne vise rien de moins que la construction d’une société qui moralise ses membres, inspire les autres, et serve de modèle à ce que pourrait être l’humanité si elle adorait le D.ieu unique qui nous a tous créés à Son image. »
Citation de la semaine
"D.ieu n’a pas choisi, ni fait alliance avec des individus en tant que tels – justes, saints, purs, innocents, droits. Il a fait alliance avec un peuple entier, justes et pas-encore-justes réunis."
Réflexions supplémentaires
Si vous deviez transmettre un message important à un large public, comment feriez-vous en sorte d’inclure tout le monde dans votre discours ?
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the
Family Edition
is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
Profits et prophètes
Édition Familiale
Dévarim
Inspiré par les enseignements et les idées de Rabbi Sacks
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Dévarim
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Résumé du Covenant & Conversation
● Ce résumé est adapté de l’essai écrit par Rabbi Sacks en 2012, disponible ici.
Il existe peu de passages aussi brûlants dans toute la littérature religieuse que le premier chapitre du livre d’Isaïe, la grande “vision” (ou “’hazon”) qui donne son nom au Chabbat précédant Ticha BéAv, le jour le plus triste de l’année juive. C’est davantage que de la grande littérature. Ce chapitre exprime l’une des grandes vérités prophétiques : une société ne peut prospérer sans honnêteté ni justice. Elle ne pourrait pas être plus pertinente pour notre époque.
Le Talmud (Chabbat 31a) enseigne que lorsque nous quitterons cette vie et arriverons aux portes du Monde futur, la première question qu’on nous posera ne sera pas une question religieuse conventionnelle (“As-tu fixé des moments pour l’étude de la Torah ?”). Cette question viendra ensuite, mais la toute première serait : “As-tu agi avec honnêteté [be-emouna] dans les affaires ?”
Les Sages ont peut-être tiré cette leçon du prophète Isaïe, qui pleura sur Jérusalem avant sa perte :
Le destin de Jérusalem fut scellé non pas par un échec religieux au sens conventionnel, mais par l’incapacité des gens à agir avec honnêteté. Ils adoptaient des pratiques commerciales rusées, très rentables et difficiles à détecter, comme le mélange d’argent avec des métaux de moindre valeur ou l'altération du vin. Les gens étaient focalisés sur le profit, indifférents aux souffrances que cela causait aux autres. Isaïe ne prétend pas révéler quelque chose que les gens ignoraient ; il ne s’attend pas à les surprendre - la corruption généralisée détruisait la confiance publique.
Isaïe enseignait que la malhonnêteté et la cupidité rongent la société de l’intérieur. Elles creusent le fossé entre riches et puissants d’un côté, pauvres et impuissants de l’autre, érodent le tissu social, et poussent chacun à se demander pourquoi faire des sacrifices pour le bien commun, si tout le monde semble poursuivre ses intérêts personnels. Accepter la corruption des dirigeants était un autre signe du déclin moral.
Même la religion, dit Isaïe, peut elle-même faire partie du problème. Les gens commencent à croire que le fait d’assister aux offices ou d’apporter des korbanot peut compenser une conduite immorale. Mais D.ieu ne se laisse pas corrompre “Que m’importe la multitude de vos sacrifices ? dit l’Éternel…Cessez d’apporter des offrandes sans valeur ! Je ne supporte plus vos réunions perverses. Quand vous étendez vos mains en prière, Je détourne mes yeux ; vous aurez beau multiplier les prières, Je n’écouterai pas.”
Une fois corrompu, celui qui apprend à tromper les autres en vient à croire qu’il peut même tromper D.ieu. Mais quand les affaires et la politique abandonnent toute norme morale, la société perd son équilibre et devient instable. Comme disent les Sages : adam bahoul al mamono — « l’homme devient fou pour son argent. » Et tout finit par s’effondrer, faisant le plus souffrir ceux qui le méritent le moins.
La voix prophétique d’Isaïe parle encore à notre époque. L’économie de marché est, et doit être, une entreprise morale. Sans cela, elle finira par échouer. Sans confiance, même les systèmes financiers les plus brillants peuvent s’écrouler.
Le mot-clé est émouna — fidélité, intégrité, confiance. Isaïe appelle deux fois Jérusalem kiryah néémanah, la « ville fidèle ». C’est pourquoi les Sages enseignent que la première question dans le ciel est : « As-tu conduit tes affaires avec émouna ? »
Une société fondée uniquement sur des contrats et des règlements, plutôt que sur la conscience, ne sera jamais véritablement sûre. Il y aura toujours ceux qui trouveront des échappatoires. La meilleure garantie reste morale : c’est la voix de D.ieu en nous, qui nous dit de ne pas faire ce que nous savons être mal.
L’avertissement d’Isaïe résonne encore. Quand la morale disparaît et que l’intérêt personnel domine l’économie et la politique, la confiance s’effondre et le tissu social s’effrite. C’est ainsi que toutes les grandes puissances ont commencé leur déclin. Il n’y a aucune exception. C’est pourquoi les faits montrent que — à long terme — il est plus sage de suivre les prophètes que les profits.
Autour de la table de Chabbat
À propos de la Paracha
Écrit par Sara Lamm
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
La paracha en bref
La Paracha Dévarim commence avec Moshé s’adressant aux Bné Israël le premier jour du mois de Chevat, 37 jours avant sa mort. Il revient sur leurs 40 années de voyage, rappelant leurs fautes et les exhortant à suivre les commandements d’Hachem en entrant dans la terre promise. Moshé évoque la nomination des juges, la faute des explorateurs, et le décret divin selon lequel lui-même n’entrera pas en Erets Israël. Il raconte les événements récents, notamment les guerres contre Si’hon et Og, ainsi que l’installation des tribus de Réouven, Gad et une partie de Ménaché. Moshé prodigue des encouragements à Yehoshoua, lui assurant qu’Hachem combattra pour eux.
Philosophie de Rabbi Sacks
Approfondissement
Vers la fin du 20e siècle, les banques américaines commencèrent à adopter des pratiques complexes et malhonnêtes, notamment en ce qui concerne les hypothèques immobilières. Des avertissements leur furent donnés sur les risques d’un effondrement financier massif. Mais comme les profits augmentaient, personne n’écouta.
En 2008, la crise financière éclata. De nombreuses personnes ne purent rembourser leurs prêts, et 10 millions d’Américains perdirent leur maison dans les années qui suivirent. Les prix de l’immobilier s’effondrèrent. Subitement, des investissements jusque-là considérés comme "sûrs" devinrent sans valeur. Les banques, ayant emprunté de l’argent sur la base de ces prêts, firent faillite.
C’est la confiance qui s’est véritablement effondrée. Ne se faisant plus confiance entre elles, les banques cessèrent de se prêter de l’argent. Cela gela l’économie. Les emprunts devinrent inaccessibles, les entreprises fermèrent, les emplois disparurent. Plus de 30 millions de personnes perdirent leur travail dans le monde entier, et des millions d’autres furent plongées dans la dette. Tout cela illustra ce qui se produit lorsque la cupidité l’emporte et que les risques sont ignorés. Ce fut la pire crise financière depuis les années 1930.
La réprimande cinglante de Yéchayahou contre Jérusalem révèle une vérité intemporelle : aucune société ne peut prospérer sans intégrité. Lorsque la confiance s’effrite sous l’effet de la tromperie, de l’avidité et de l’exploitation, l’effondrement est inévitable.
Activité sur la paracha
Messager digne de confiance
Demandez à un volontaire de quitter la pièce. Les autres s’accordent ensuite sur une mission farfelue, comme "donner une cuillère à maman en chantant." Lorsque le volontaire revient, il doit accomplir sa mission sans aucune instruction verbale. Les autres joueurs ne peuvent guider le volontaire que par des applaudissements quand il est sur la bonne voie, et des acclamations lorsqu’une partie de la mission est correctement réalisée. Tout le monde doit l’encourager et espérer sa réussite.
Quels types de confiance sont mis en jeu ici ?
Une histoire pour tous les âges
Vrai ou faux
Il existe un lieu connu de tous. On l’appelait autrefois "la Ville Fidèle". Elle avait gagné ce nom il y a plusieurs générations, car ses habitants étaient réputés pour leur honnêteté, leur équité et leur compassion. Les marchés y étaient toujours animés, pleins de bannières, de voix joyeuses, de visages amicaux et d’échanges équitables. Les dirigeants étaient respectés, parfois même aimés, et les citoyens s’entraidaient sans hésiter.
Mais peu à peu, quelque chose changea. Les marchands d’argent découvrirent qu’ils pouvaient augmenter leurs profits en mélangeant des métaux moins chers et en augmentant les prix. Les vignerons diluaient leurs barriques. Les juges commencèrent à favoriser ceux qui leur offraient des cadeaux. Même si personne ne le disait ouvertement, tous remarquaient le changement. La peur d’être exploité s’installa et ce climat affecta d’autres comportements. Il devint rare de venir en aide à quelqu’un en détresse sur la route. La monnaie rendue sur les étals était souvent erronée, et les objets trouvés rarement restitués.
"Ce n’est pas bien", murmura une marchande à son fils tout en escroquant un client, "mais si je ne le fais pas, quelqu’un d’autre le fera."
La ville avait toujours la même apparence extérieure. Les gens allumaient encore leurs lampes, se réunissaient pour les fêtes et chantaient les anciens chants. Mais derrière les portes closes, les pauvres étaient ignorés, les puissants devenaient plus audacieux, et la confiance – autrefois monnaie la plus précieuse de la ville – se faisait rare. La vie continuait. Les marchés restaient ouverts. Les pièces continuaient de passer de main en main. Et peut-être, juste peut-être, chacun se demandait en silence si ce qu’il faisait était juste. Mais personne ne disait rien. Pas encore. La ville se disait toujours fidèle. Et les bannières flottaient encore, même si, en y regardant de près, leurs bords commençaient à s’effilocher.
Que faudrait-il pour qu’enfin quelqu’un prenne la parole ? Et serait-il entendu ?
Comment cette histoire pourrait-elle se terminer si la trajectoire actuelle se poursuivait ?
À propos de la Haftara
Écrit par Rabbi Barry Kleinberg
Inspiré des enseignements de Rabbi Lord Jonathan Sacks
Résumé de la Haftara
La Haftara en bref
Yéchayahou 1:1-27 (Ashkénazes et Séfarades)
Yéchayahou 1:21-31 (Yéménites)
Yéchayahou 1:1–27 ouvre le livre d’Isaïe avec un message prophétique puissant contre Juda et Jérusalem, livré durant les règnes de Ozias, Yotam, Ahaz et Hizkiyahou. D.ieu déplore que Ses enfants se soient rebellés malgré Ses soins. La nation est moralement corrompue – pleine d’injustice, de violence et de culte hypocrite. Les rituels religieux sont dénoncés comme dénués de sens s’ils ne sont pas accompagnés de justice. D.ieu appelle à la téchouva : "Lavez-vous, purifiez-vous… cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien."
Par la bouche de Yéchayahou, D.ieu presse le peuple de poursuivre la justice, de défendre les opprimés, de prendre soin des veuves et des orphelins. S’ils se repentent, ils seront pardonnés et bénis ; sinon, ils subiront le jugement.
Et pourtant, le chapitre se conclut sur une note d’espoir : Tsion sera purifiée par le jugement, et la justice y régnera à nouveau. D.ieu promet que la droiture habitera un jour Jérusalem ; les repentants seront rachetés, tandis que les rebelles seront brisés. Le message mêle réprimande et appel au renouveau.
Points de réflexion
Ne nous égarons-nous pas tous parfois ? Pourquoi les juges doivent-ils faire preuve d’une intégrité absolue ?
Connexions du Tanakh
Liens entre la paracha et la Haftara
La haftara de cette semaine est toujours lue le Chabbat précédant Ticha BéAv et n’est donc pas directement liée à la paracha ; elle a été choisie en raison de sa pertinence dans le calendrier juif.
On peut néanmoins établir un lien avec la paracha de la semaine. Moshé mentionne dans Parachat Devarim que les Shoftim (juges) de Bné Israël doivent être des hommes d’une intégrité absolue (Devarim 1:16-17). Cela fait écho à la prophétie d’Isaïe sur le rétablissement des juges (Isaïe 1:26-27).
Une remarque du Rav Sacks sur les Shoftim de l’époque biblique : « Les "juges" mentionnés n’étaient pas simplement des magistrats au sens contemporain. Ils étaient des chefs militaires qui apparaissaient ponctuellement lorsque les Israélites – alors une confédération désordonnée de tribus – étaient attaqués par des ennemis. L’un des plus célèbres fut Gédéon, qui mena le peuple à la victoire contre les Midianites. Sa campagne fut si impressionnante que le peuple voulut le faire roi. Il répondit par des mots qui touchent au cœur du sujet : "Je ne régnerai pas sur vous, ni mon fils après moi. C’est Hachem qui régnera sur vous" (Juges 8:23). »
Notons au passage que les Bné Israël ne sont pas les seuls à devoir instituer des juges au sens juridique. Le Rambam l’énonce ainsi : « [Tous les peuples] doivent désigner des juges et des officiers dans chaque localité pour faire respecter les six autres lois noa’hides, avertir la population, et punir les contrevenants… » (Lois des Rois, 9, 14)
Pourquoi une telle insistance sur les systèmes juridiques ? Sans juges ni tribunaux, une société peut rapidement sombrer. Et de même, si les tribunaux manquent de droiture, on ne peut faire confiance à la justice.
Contexte pour les Prophètes
Le livre d’Isaïe
Alors que nous entamons la lecture de ce dernier livre de la Torah, il est bon d’en rappeler la portée.
Dans son introduction au livre de Devarim, Rav Sacks évoque "la place de Devarim dans le Tanakh tout entier. C’est l’axe autour duquel tourne toute l’histoire juive. Si la génération sortie d’Égypte avait eu la foi et le courage d’entrer en Terre promise, toute l’histoire juive aurait tourné autour de la révélation au Sinaï. Mais l’épisode des explorateurs a montré que cette génération manquait de l’esprit nécessaire. Le moment décisif est donc venu pour la génération suivante, lorsque Moshé – à la fin de sa vie – renouvelle l’alliance avec eux, condition à leur héritage de la terre. Les quatre livres précédents mènent à ce moment, et tous les autres livres du Tanakh en sont le commentaire – le récit de ce qui s’est produit par la suite.
« Devarim est le livre de l’alliance, le centre de la théologie juive, et le projet qu’il définit est unique. Il ne vise rien de moins que la construction d’une société qui moralise ses membres, inspire les autres, et serve de modèle à ce que pourrait être l’humanité si elle adorait le D.ieu unique qui nous a tous créés à Son image. »
Citation de la semaine
"D.ieu n’a pas choisi, ni fait alliance avec des individus en tant que tels – justes, saints, purs, innocents, droits. Il a fait alliance avec un peuple entier, justes et pas-encore-justes réunis."
Réflexions supplémentaires
Si vous deviez transmettre un message important à un large public, comment feriez-vous en sorte d’inclure tout le monde dans votre discours ?
Written as an accompaniment to Rabbi Sacks’ weekly Covenant & Conversation essay, the Family Edition is aimed at connecting teenagers with his ideas and thoughts on the parsha.
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