Chers lords, je suis reconnaissant envers le noble lord, Lord Popat, d’initier ce débat, et j’aimerais dire pourquoi. Le plus grand danger auquel une civilisation est confrontée est lorsqu’elle souffre d’amnésie collective. Nous oublions à quel point les petits débuts mènent à des fins terribles. Un millénaire d’histoire juive en Europe a ajouté certains termes au vocabulaire humain : conversion forcée, inquisition, expulsion, ghetto, pogrom, holocauste. Une fois que la haine a été libérée, la route vers la tragédie est courte.
Chers lords, cela me fait beaucoup de peine de parler d’antisémitisme, la haine la plus vieille du monde. Mais je ne peux pas garder le silence. L’un des faits les plus tenaces de l’histoire est que la plupart des antisémites ne se disent pas antisémites. “Nous ne haïssons pas les juifs”, ont-ils dit au Moyen Âge, “juste leur religion”. Nous ne haïssons pas les juifs”, ont-ils dit au dix-neuvième siècle, “juste leur race”. Nous ne haïssons pas les juifs”, disent-ils aujourd’hui, “juste leur pays”.
L’antisémitisme est la haine la plus difficile à combattre, car, tel un virus, elle mute, mais une chose reste la même. Les juifs, que ce soit au titre de religion, d’ethnie ou d’État d’Israël, sont transformés en boucs émissaires pour des problèmes dont chacun est responsable. C’est de cette façon que la route vers la tragédie commence.
L’antisémitisme, ou toute forme de haine, devient dangereux lorsque trois éléments entrent en jeu. D’abord, lorsque, confiné en marge de la politique, il est incarné par un parti dominant et par son équipe dirigeante. Ensuite, lorsque le parti remarque que sa popularité auprès du public n’est pas impactée. Et enfin, lorsque ceux qui se lèvent et protestent sont calomniés et maltraités. Ces trois facteurs existent en Angleterre aujourd’hui. Je n’ai jamais cru que je témoignerai de ce phénomène de mon vivant. C’est la raison pour laquelle je ne peux pas garder le silence. Car ce ne sont pas uniquement les juifs qui sont en danger. Notre humanité l’est également.