La liberté de religion et de croyance
Read In
- English
- Français
Share
Je remercie le noble lord, Lord Alton, pour nous permettre à nouveau d’aborder cet enjeu vital qu’est la liberté religieuse, et aussi la baronne Berridge pour diriger l’APPG [groupe parlementaire multipartite ou All-Party Parliamentary Group en anglais] sur la liberté et la croyance religieuse internationale. Je les félicite de leur courage de se confronter à ce qui est probablement l’enjeu humanitaire le plus délicat de notre génération.
Trois choses sont survenues et ont changé l’environnement religieux de notre époque. D’abord, les régimes nationalistes laïcs qui sont apparus dans plusieurs régions du monde au vingtième siècle ont donné naissance à de fortes contre-révolutions religieuses.
Ensuite, ces révolutions sont menées par la religion sous la forme la plus extrême, hostile et anti-occidentale.
Troisièmement, la révolution de la technologie de l’information a permis à ces groupes de former, organiser et communiquer à des adeptes potentiels et existants à travers le monde à une vitesse vertigineuse. Internet est à la religion politico-radicale ce que l’imprimerie était à Martin Luther. Cela leur a permis de contourner toutes les structures de pouvoir existantes.
Le résultat a été la politisation de la religion et la religiosité de la politique ; tout au long de l’Histoire, cette combinaison a été mortelle. À long terme, cela nous menacera tous car à une époque de globalisation, aucun pays et aucune culture ne sont isolés du reste du monde.
Nous devons faire trois choses au minimum. D’abord, compte tenu du fait que la liberté religieuse soit inscrite dans l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies, il doit y avoir, sous l’égide des Nations unies, un rassemblement de dirigeants religieux et d’intellectuels pour formuler collectivement une série de principes qui soient viables d’un point de vue théologique, au sein de leur religion respective, et à propos desquels les nations membres peuvent demander des comptes. Sinon, l’article 18 continuera d’être un idéal utopique.
Deuxièmement, nous devons faire un travail théologique. Et ce travail est crucial. C’est ce qui s’est produit en Europe après les guerres de religion aux seizième et dix-septième siècles. Un groupe de penseurs, parmi lesquels John Milton, Thomas Hobbes, John Locke et Baruch Spinoza se sont assis, ont relu la Bible et ont formulé les idées les plus importantes jamais formulées sur l’État et la société : le contrat social, les limites morales du pouvoir, la liberté et la conscience, la doctrine de la tolérance et le concept même des droits de l’homme.
Ce sont des idées religieuses basées sur la Bible, et c’est ce que John F. Kennedy a voulu dire lorsqu’il déclara lors de son discours inaugural : “les mêmes croyances révolutionnaires pour lesquelles nos ancêtres se sont battues sont toujours des enjeux dans le monde d’aujourd’hui ; la croyance que les droits de l’homme ne proviennent pas de la générosité de l’État, mais de la main de D.ieu”.
Nous n’avons pas encore fait de travail théologique pour une société globalisée à l'ère de l’information ; et ce ne sont pas toutes les religions du monde qui font partie de ce dialogue. Si nous négligeons la théologie, tout le reste échouera.
Troisièmement, nous devons nous serrer les coudes, peuple de toutes les fois ou d’aucune, car nous sommes tous en danger. Les chrétiens sont persécutés au Moyen-Orient. Les juifs sont confrontés à un antisémitisme nouveau et renaissant. Les musulmans qui se situent du mauvais côté du conflit entre sunnites et chiites se font tuer en masse. Les hindous, les sikhs, les bouddhistes et les baha’i sont également persécutés dans certaines régions du monde.
Il doit y avoir certains principes auxquels nous pouvons nous référer, et d’autres auxquels nous devons être comptables, si notre humanité commune doit survivre à nos différences religieuses. La liberté religieuse se concentre sur notre humanité commune, et nous devons nous battre pour elle afin de ne pas la perdre. Je pense que c’est l’enjeu majeur de notre époque.